R.S.D.A
Le Maire face aux animaux dangereux
Quelle est la législation applicable aux animaux dangereux, et quelles sont les compétences dévolues aux maires pour mettre fin aux troubles occasionnés par ces animaux? Monsieur Pascal Combeau et Mme Maryse Deguergue, professeurs en droit public, respectivement à Bordeaux et Paris 1er, font le point. A lire dans la Revue Semestrielle de Droit Animalier, 2019 1-2, p. 57.
Par A.T., membre de l'APRAD
Pour étayer leur exposé, ils se sont appuyés sur trois Arrêts de la Cour Administrative d’Appel, rendus au 1er trimestre 2019 (1) mettant en avant le cas de trois espèces différentes (chien, bovin et poney), exprimant chacune un caractère de danger.
Qu’est-ce qu’un animal dangereux? Dans ces trois exemples, les auteurs démontrent que la notion d’animal dangereux est très aléatoire et n’est pas spécifiquement liée à l’animal lui-même mais souvent à l’homme, responsable de son animal. On comprendra aussi aisément que ce ne sont pas les animaux eux-mêmes qui sont dangereux mais la situation particulière dans laquelle ils se trouvent, à un moment précis.
Il faudrait ici faire une parenthèse pour préciser que l’animal dangereux n’est en aucun cas défini juridiquement, contrairement, par exemple, aux animaux nuisibles qui apparaissent sur une liste.
De plus, force est de constater que même si les auteurs appuient leurs arguments sur des arrêts rendus tous trois au cours du premier trimestre 2019, la jurisprudence concernant les animaux dangereux reste malgré tout très maigre.
Dans les différents codes, ces animaux sont même appelés parfois “animal malfaisant et féroce” (art. L 2212-2, 7°du CGCT) ou même “susceptibles de présenter un danger” (art. L 211-11 du CRPM).
Après avoir démontré par le biais de ces trois arrêts la difficulté de l’interprétation de la dangerosité de l’animal, Monsieur Combeau et Mme Deguergue expliquent comment le Maire peut intervenir lorsqu’il y a confrontation à la dangerosité d’un animal.
En effet, le Maire a des devoirs et obligations, lui conférant aussi bien des pouvoirs de police administrative générale, qui assurent pour l’essentiel la tranquillité publique et la sécurité publique, que des pouvoirs de police administrative spéciale, pouvoirs limités à certains domaines, dont le domaine animalier.
Alors, au nom de quelle police administrative le Maire interviendra-t-il pour remédier aux divers troubles liés aux animaux ?
Les trois arrêts développés brièvement ci-dessus illustrent bien ces deux pouvoirs distincts concrétisés par la police administrative générale et la police administrative spéciale.
La police administrative générale a été employée pour le cas du bovin divaguant sur la route ayant causé un accident de la circulation. Pour s’exonérer de sa responsabilité, le Maire a évoqué l’article L 2212-2-7 du CGCT.
Les auteurs ne manqueront pas de souligner néanmoins la dualité avec la police administrative spéciale en charge également de la divagation des animaux sur la route.
A côté de la police administrative générale,on trouve également la police administrative spéciale du maire ou du préfet parfois, c’est ce que nous expliquent M. Combeau et Mme Deguergue.
Elles servent à prévenir un risque ou un danger particulier, par exemple, pour le cas de la police des animaux errants, ou la police zoosanitaire.
Leux des arrêts présentés par nos auteurs en sont l’illustration : dans le cas bordelais, on y applique L. 211-11, 1 du CRPM, car les poneys représentaient un hypothétique danger, dans le cas nantais, exposant le cas du chien mordeur, c’est l’article L. 211-11, II, qu’on applique, article qui confère des moyens plus importants encore.
Le maire dispose donc d’un large choix de moyens pour faire face aux animaux dangereux. Cependant, cette étendue de pouvoirs justifie-t-elle le droit de prononcer leur mise à mort par la voie de l’euthanasie alors que bien souvent l’homme est à la source de ces désagréments ?
(1) CAA Nantes 4/01/2019 c/commune d’Orleans n°18NT00839 ; CAA Marseille 21/01/2019 c/solaro n°17MA03970 ; CAA Bordeaux 8/02/2019 c/lignac n°17BX01862